Thursday, July 17, 2014

L'IMPORTANT, C'EST LA ROSE...

En réponse à un journaliste qui lui demandait si le récent rapprochement entre Saad el Hariri et le General Aoun favoriserait ses chances à ce dernier pour la présidence, Ahmad Fatfat, prenant son ton le plus mielleusement contempteur, minauda:''...vous savez; le Cheikh Saad a toujours été favorable à toute démarche de pacification venant de n'importe quel parti; mais de là à s'imaginer que cela suffirait pour l'impliquer dans de petites magouilles locales alors qu'il est en charge de dossiers régionaux et internationaux dont l'amplitude et l'importance excédent l'envergure et l'entendement d'un Michel Aoun, est une autre affaire...''.

Sacredieu; voila qui est joliment dit ...!
Après cela, comment ne pas évoquer l'ancien dicton Libanais qui cite :

 من قلّة الرجال، سمّينا الديك بو قاسم - 
-Traduction: ''C'est la pénurie en hommes, qui nous fit nommer notre coquelet: Le père Kassem.''

Ironiquement, c'est donc au sieur Fatfat que je dois un de mes éclats de rire les plus francs de ces derniers mois.

Stipendié va !

Si d'incontestables éléments comiques existent dans toute tragédie, l'immuable rituel qui semble s'être installé au cours de nos multiples tentatives pour élire un nouveau président, et dont les phases principales sont reproduites ci-dessous, n'échappe pas à cet axiome.

1 - Au jour J, toutes les issues menant au parlement sont fermées, les routes bloquées et le centre-ville paralysé (voir photo ci-haut).

 2 - À l'heure H, Les députés déferlent en d'imposants convois et rutilantes limousines noires, pressés comme il se doit d'accomplir leur devoir national

3 - Enfer et damnation !!! Pour la septième fois consécutive (ou la huitième, à moins que cela ne soit la dixième !?...) le seigneur QUORUM n'est pas au rendez-vous !!!

 4 - Devant les journalistes goguenards, un porte-parole de l'ISTIZ, débite un communiqué laconique, ajournant les présidentielles à une date ultérieure.

 5 - Sur les marches du parlement, un député FL (de préférence, le sieur Antoine Zahra), entame devant les représentants de la presse, une diatribe meurtrière contre le General Aoun.

6 - Tapi dans sa tanière, Samir Geagea, qui a tout suivi sur son écran personnel, tient en direct de son bunker de Maarab, l'inévitable conférence de presse télévisée.
Tour à tour Platon, Démosthène, Gibran, Tom (& Jerry) et Jésus-Christ, l'ancien spadassin évite de mentionner ouvertement Michel Aoun, mais le responsabilise par mille détour et ricochet, de tous les maux qui accablent le Liban d'aujourd'hui.

7 - Avant que la nuit ne tombe sur cette journée mémorable, les Libanais, qui en ont vu d'autres, ont déjà tout oublié.

Tout est donc pour le mieux dans le meilleur des mondes, et les trois sacro- saintes unités de la tragédie classique (lieu-temps-action), ont étés scrupuleusement respectées.

 ****

Tel Al-Moutanabbi, rentrant bredouille de la cour d'Egypte, notre General s'en retourna de son escapade Parisienne, gros Jean comme devant.

Mais à cela, tout le monde s'y attendait un peu, sauf le General lui-même, qui ne voulait, semble-t-il, pas entendre que notre Cheikh Saad national ne pouvait se soulager du moindre petit gaz, sans le consentement de ses maîtres Wahhabites; que notre Doktor Geagea n'est nullement en mesure de contrecarrer le moindre dessein, à ceux qui détiennent le pouvoir de le rejeter illico dans le cul-de-basse-fosse duquel ils l'ont exhumé; que pour notre Sleiman Frangié, l'amitié de Bachar-el-Assad passera toujours avant son alliance avec le Tayyar; que parmi tous les antéchrists existants, Walid Joumblatt est de loin le plus pernicieux; que Bkerké ne soutiendrait jamais un président turbulent, passible d'empiéter sur ses plates-bandes privées; et que le Hizballah est trop sagace pour laisser quiconque l'entraîner là où il ne le veut pas.

Du reste, quoi de plus naturel que de voir et d'entendre l'habituelle clique ploutocratique, accaparatrice et capitularde, s'en prendre aujourd'hui plus violement que jamais à un Hizballah qui eut l'audace d'aller au-devant de leurs machinations, et de verrouiller au prix du sang la frontière Syro-libanaise, empêchant ainsi les cannibales de Dieu de déborder en masse la ligne de démarcation, et d'effectuer la jonction avec les régions libanaises sympathisantes allant des plaines du Hermel jusqu'aux plages de Tripoli.

L'exemple Iraquien étant toujours de brûlante actualité, il m'est difficile de ne pas me demander sur qui ou quoi, dois-je vraiment compter pour défendre le Liban en cas de malheur. Est-ce sur les Daechistes de luxe et cédés de ''l'auto-distanciation'', ou plutôt sur Sitt Rida, Sitt Nayla, et les speakerines de la MTV ?

Mais blague à part, un peuple affranchi sait d'emblée qu'on ne peut vraiment compter que sur soi-même, et que les droits les plus légitimes s'arrachent et ne s'octroient pas; mais c'est là justement que le bât blesse.

Qu'attendre d'un peuple de bourriques passives, qui s'est résigné depuis plus d'un quart de siècle à vivre privé d'eau, d'électricité et du moindre de ses droits les plus fondamentaux.

Mais qui retrouve tout son mordant lorsqu'il s'agit de réclamer le désarmement (sélectif) du Hizballah.

J'ai bien dit sélectif, car tous les partis conviennent qu'il est virtuellement impossible de désarmer tant le Hizb que les innombrables autres milices présentes sur le sol Libanais, (palestiniennes comprises), de leurs armes légères et conventionnelles, pourtant amplement suffisantes pour alimenter une guerre civile meurtriere.

En réalité, ce que nos épouvantails du ''Liban d'abord'' convoitent (et leurs maîtres occidentaux derrière eux), est l'arsenal de missiles balistiques tactiques du Hizballah, arme quasiment inutilisable en cas de conflit intérieur, mais aussi carte de dissuasion régionale formidable qui suscite les nuits blanches d'Israël, et freine ses visées belliqueuses vis-à-vis du Liban...!!! 


Qu'attendre d'un peuple dont une faction chante, dance, et allume des feux de joie aux nouvelles du malheur de l'autre ?

Qu'attendre d'un peuple prêt à tout sacrifier pour que vivent ses milliardaires, alors que ses propres fils crèvent dans la misère ?

Qu'attendre d'un peuple qui se targue d'être le plus évolué de la région, mais qui laisse aux bédouins de la Jahilliyyah, le soin de lui choisir un président ?

Qu'attendre...qu'attendre...qu'attendre...

Et puis ZUT; à quoi bon !

****

Un très cher et vieil ami me surprit l'autre jour avec un des plus beaux cadeaux que l'on puisse me faire; en l'occurrence, de deux jeunes pousses de Frangipanier; cet arbre magnifique à la merveilleuse floraison luxuriante et délicatement parfumée, si robuste et généreux en jardin, mais tellement délicat à cultiver sur la terrasse d'un appartement.

Je vous laisse donc imaginer ma joie, lorsque ma patience et mon assiduité furent récompensées par une première floraison prometteuse. (Voir photo ci-bas).

En vérité je vous le dis; Le radieux sourire matinal de ces charmantes fleurettes est bien plus important pour moi que toutes les misères décrites dans ce billet sans espoir.
Merci l'ami.
  


Ibrahim TYAN.

2 comments:

  1. Plaisir intact de te lire. J'ai bien ri (jaune, certes) parfois à tes traits d'humour (n'est-il pas la politesse du désespoir selon Boris Vian ?) mais je suis en admiration devant ta jeune pousse de frangipanier. C'est un de mes rêves mais le climat hivernal du Lubéron lui serait fatal...
    Amitiés,

    Sixtine

    ReplyDelete
    Replies
    1. Le plaisir est toujours mien chère Sixtine.

      Tout comme toi, il m'est quasi impossible de planter un frangipanier dans mon terrain à la montagne vu le climat rigoureux qui y sévit pendant de longs mois de l'année. Alors je suis réduit à la cultiver sur la terrasse de mon appartement Beyrouthin.

      J'aime cette plante parce que je sens qu'elle me ressemble. Elle aime la chaleur, le soleil, et le bord de la mer. Elle est à la fois simple et panachée, et vous rends le peu de soins qu'elle requiert au centuple.

      Amitiés
      Ibrahim.

      Delete